Laffon, Martine - Flammarion jeunesse


France, 1917. Deux soldats français, Blanchard et Drouault ne peuvent s’empêcher de se soucier de Li Jian, un jeune travailleur civil chinois, recruté comme 140 000 de ses compatriotes pour participer à l’effort de guerre en Europe. Son contrat de travail stipule qu’il ne doit jamais se trouver à moins de seize kilomètres des lignes du front. Or la guerre ne se soucie ni de lignes géographiques ni de contrats. Li Jian, contrairement à ses compagnons d’infortune, n’est pas un rustre. Français, anglais ou chinois, tous ont pris l’habitude de le surnommer « le lettré ». Esprit sensible et délicat, Li Jian passe le plus clair de son temps libre à dessiner ou à calligraphier. Les charniers et la Mort qui rôde dans les boyaux des tranchées, piétinant ou projetant dans les airs des hommes déchiquetés, font vaciller brutalement la raison du jeune homme. « La beauté qu’il tentait de saisir dans ses dessins, était incapable de réduire la réalité de la violence. Ici, dans ce chaos d’hommes et de bêtes, dans l’enchevêtrement de leurs corps meurtris, la mort n’était pas le recommencement de la vie. Même les paysages se tordaient de douleur. Quand tous ces champs de bataille se couvriraient d’arbres et de fleurs sauvages, la terre enserrerait encore l’âme des morts avec leurs ossements. » Seul moyen d’atténuer sa terreur, se blottir contre Dreamy, une jument anglaise blessée par un éclat d’obus. Lorsque le pur sang, rendu fou par des explosions, prend la fuite, Li Jian ne peut se résoudre à être séparé d’elle quand bien même on le fusillerait en tant que déserteur. Un roman qui dresse un portrait touchant d’hommes très divers pris dans la tourmente de la guerre. Idéalistes, pragmatiques, opportunistes ou artistes, tous sont marqués à vie par l’épreuve vécue en commun. L’ouvrage rend un hommage vibrant au sacrifice de chevaux engagés, bien malgré eux, dans une guerre commanditée par des hommes.

Marga Lopez