Mankell, Henning - Seuil


C’est la 3e et dernière partie de l’histoire de Joël qu’on a découvert avec Les ombres grandissent au crépuscule. Mais le roman peut tout à fait se lire isolément. Joël, 15 ans, vit avec son père bûcheron dans un village perdu au nord du nord. La mère les a un jour quittés sans explication. Le père boit et semble avoir oublié ses rêves d’ancien marin, au désespoir de Joël qui s’occupe de la cuisine et se morfond dans le froid, l’absence d’horizon et la solitude. Lorsqu’il retrouve la trace de sa mère, Joël entraine son père à Stockholm pour la revoir. Plus de 10 ans ont passé. Cette quête de la mère dans la grande ville hostile est très émouvante et très juste, n’édulcorant aucune des difficultés et des émotions de part et d’autre. Parallèlement, c’est aussi la quête de la mer dont il rêve avec ses grands cargos qui vont l’emmener loin d’ici. Le père le lui a promis. Mais c’est trop tard pour le père. Courageux, déterminé, le fils s’embarquera seul. L’enfance est terminée. Joël a commencé son long voyage. Cette solitude du garçon qui assumait déjà tous les rôles familiaux est la marque de ce roman d’initiation, livre triste mais à la forte empreinte, presque aussi noir que les formidables polars de cet auteur. Les adultes n’y sont guère brillants mais les jeunes lecteurs aimeront ce garçon attachant, à la fois vulnérable et droit dans ses bottes, qui a le courage de suivre son rêve. Mais pourquoi diable Henning Mankell, parce qu’il vise un public grands ados, transforme-t-il sa si belle écriture, dense et riche, en ce style squelettique sans subordonnées, où chaque phrase a moins de 10 mots ?? Faudrait-il leur servir une littérature spécial génération SMS ?!

Claudine Charamnac Stupar