David, François - Motus

Illustrateur : Thiébaut, Olivier

Livre de monstres, certes mais cet album atypique se révèle complexe à cerner et à présenter. Est-ce un pastiche de documentaire, présentant des créatures sorties à la fois de l’imagination et des boites pleines d’objets hétéroclites du plasticien Olivier Thiébaut ? Une réflexion sur le monstrueux, l’effrayant, « chacun son monstre » ? En fait, l’album m’apparait plutôt comme un livre d’art, une galerie de portraits. Chaque double page reproduit en effet une composition plastique en trois dimensions représentant un monstre, et en regard, un texte de François David intitule et commente le « tableau ». Commentaire ludique ou poétique ou humoristique, parfois grave, François David use aussi parfois d’un second degré qui ne parlera qu’aux plus grands voire aux seuls adultes connivents. (Ainsi Le Monstre humain trop humain, « qui avait beaucoup lu La Fontaine », vieux lion avec un bandeau sur l’oeil, rappelle quelqu’un !…). Le plus étonnant reste le parti pris plastique, les monstres étant portraiturés par des assemblages d’objets, entiers, fragmentés, ou mis en scène. Comme si Arcimboldo avait oublié son pinceau pour utiliser de vrais fruits ou de vrais livres dans ses portraits. Le Monstre Brise-tout est ainsi fait de révolvers, de faïences brisées, de cibles en carton, épingles, branchages, figurines… Le Monstre Marin est d’abord une vraie – impressionnante – tête de poisson desséchée. Cet élémentaire de la représentation peut être déroutant mais tout à fait dans l’esprit d’un Spoerri et des Nouveaux Réalistes qui, dans
la filiation de Dada, ont fait entrer l’objet réel dans l’art. Les enfants, expérience faite, adorent repérer « de quoi est fait le monstre ». C’est déjà une démarche artistique ! Il y en a donc pour tous les âges.

Claudine Charamnac Stupar