Page Tsou - HongFei


Un album qui ne ressemble à aucun autre. D’abord par le style graphique dont l’originalité est un curieux mélange de dessins anciens, de photos passées, de collages numériques qui remplissent les formes de leurs motifs répétitifs, le tout dans une brume gris rose qui dilue tous les effets. Il faut découvrir Page Tsou, artiste taïwanais qui a eu le Prix de l’Illustration à Bologne en 2011. Sous sa couverture à dessins géométriques comme un papier cadeau, le livre raconte une histoire simple a priori : un petit garçon solitaire, « pas heureux », se voit offrir par son père un ticket d’entrée pour un musée d’art, cadeau qu’il reçoit sans joie. Chaque page porte alors l’indication temporelle de ce 24 décembre 1990, entre 13.10, et 18.57, soulignant le temps suspendu de cet épisode fondateur. L’auteur ne se contente pas d’un récit linéaire : avant la visite proprement dite du musée avec les parents, expédiée en 2 pages, il y a un premier déroulé surprenant. Quand l’enfant pénètre dans une sculpture extérieure, une première visite commence, où tout est étrange. Le monsieur du guichet a une patte animale, le vestiaire ressemble à un inquiétant cabinet de curiosités… C’est que le musée fonctionne grâce à « la machine à imagination »… c’est la rencontre avec
l’art qui est évoquée là, le rôle des musées, l’ouverture de l’imaginaire qu’ils déclenchent. Par ailleurs avec humour, l’auteur démystifie l’admiration qu’on croit imposée, l’effet intimidant du lieu. Ajoutons la note touchante d’un épisode qu’on sent vécu par Page Tsou : ce livre est un cadeau.

Claudine Charamnac Stupar