Nadine Robert - Saltimbanque éditions

Illustrateur : Valeria Vidali

Un éléphant numérique très stylisé nous tourne le dos sur une couverture aux seuls bleus, cela est peu engageant, mais quelque chose d’énigmatique vous retient. Et vous découvrez un bijou. Un vrai bel iconotexte où l’image fait le propos autant que le texte. Celui-ci est par ailleurs subtil : l’éléphant a du chagrin, aucun de ses amis n’arrive à l’en sortir malgré les efforts déployés de tendresse et de facéties. Une petite souris tout aussi cabossée s’incruste doucement près de lui : juste être là. Et le chagrin de l’une permet au chagrin de l’autre de s’exprimer. C’est pudique et humainement magnifique et la construction des images en ouvre la compréhension : à droite, le dos immobile de l’éléphant triste, comme enfermé dans son bleu nuit, séparé des autres qui défilent sur les pages de gauche colorées. Avec l’arrivée de la souris, l’éléphant est alors présenté à gauche. Il est de profil, on voit son oeil. L’éléphant pleure, il s’ouvre à l’autre, tourné vers la droite du livre, vers l’avenir à feuilleter, un avenir encore bien bleu nuit mais qu’ils vont partager à deux. Ainsi l’éléphant traversera la double page, la souris sur le dos et c’est parti, ils sont partis. Absolument admirable et le parti pris de l’image numérique est ici remarquable, d’une fluidité autant esthétique que symbolique.

Claudine Charamnac Stupar