Y a plein de manières d’être un garçon

Décidément, être-garçon qui était l’évidence même, la référence, le héros quasi universel auquel les lectrices aussi étaient sommées de s’identifier, être-garçon donc devient LA question qui irrigue nombre d’ouvrages nouveaux. Devant le tsunami de sujets de société féministes allant des Metoo successifs à la question du consentement ou la culture du viol, et en littérature jeunesse, de représentations nouvelles, d’héroïnes qui n’ont peur de rien et parlent haut et fort, de remise en cause de stéréotypes bien ancrés…on perçoit que la question « qu’est-ce qu’être un garçon aujourd’hui ? » devient légitime voire urgente. On avait bien aimé l’ouvrage de 2024 Etre garçon, La masculinité à contre-courant, même format, même type de discours direct adressé au jeune, même objectif de sortir des stéréotypes. Mais être à contre-courant n’est pas forcément le désir des jeunes toujours anxieux d’être intégrés. Cet ouvrage également bienveillant a une autre approche : ni norme, ni modèle  unique, ni injonction à être. Y a plein de manières d’être un garçon est une affirmation à priori rassurante, inclusive, qui laisse place aux questionnements les plus intimes voire douloureux. Car, pour l’enfant qui entre en adolescence, certaines questions semblent indicibles, impartageables, on a l’impression d’être seul à penser cela, il faut cacher cette faiblesse ou cette « anormalité » : l’ouvrage rassure intelligemment sur ces thématiques. Être garçon n’est ni évident, ni facile, ce peut être une chose et son contraire : la manière de s’y installer peut aussi changer avec le temps. Le livre a trouvé le niveau de langue juste, sans démagogie mais avec beaucoup d’empathie, pour tenir un discours aussi éloigné du documentaire que de l’injonction de conduite. Recommandé.

Claudine CHARAMNAC-STUPAR